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L’insoutenable légèreté



C’était quoi déjà ce truc de ta to do list qui t’a empêché de dormir cette nuit ? Ah oui, non, tes vœux pour clore 2020, l’insoutenable légèreté de l’année…S’ils savaient que ta prof de latin, il y a plus de deux fois vingt ans déjà, te lisait Risibles Amours de Kundera entre deux Métamorphoses d’Ovide... L’Insoutenable légèreté de l’être n’était même pas encore écrite ! Tu leur dis quoi alors pour dire au revoir à 2020 ? Time Magazine a mis proche de zéro, ils ont barré l’année la pire, The Worst Year Ever, les cons, tu as toujours détesté Time depuis les colles d’anglais des classes prépa.


20/20 pour 2020 alors? Quand tu habitais là-bas il y a trente ans, Mahatir voulait que sa Malaisie soit un pays développé en 2020, c’était sa Vision 2020. Or le mec était à nouveau premier ministre en 2020 (à 94 ans) et il n’a même pas eu le cran de reconnaître qu’il s’était planté. Au lieu de ça, il a insulté la France, alors que Didier Roussille, son gendre mort d’alcool, était un Français moyen…


En fait, 20/20 en 2020, c’est antisocial, c’est pas mal après tout : l’injonction permanente, mondiale, télévisuelle, romanesque, les instructions gouvernementales, la pensée unique de l’année, c’est que 2020 était totalement pourrie, et toi tu mettrais la meilleure note. Ils vont te trouver snob.


Si tu leur dis que tu as reposé ton corps en 2020 et que tu as quand même réussi à voir un bout de Biélorussie, de Lituanie, de Lettonie, de Croatie et de Monténégro, soit cinq de plus sur ta liste qui passe la barre des 50% des pays de l’ONU, tu vas encore te prendre des scuds des activistes de Flygsam.


Ils attendent que tu leur parles de ce virus qui aurait pourri 2020, c’est ça en fait ? Est-ce qu’ils comprennent que tu es choqué qu’il ait tout chamboulé comme ça ce foutu SARS-CoV-2, alors que tes copains morts du VIH il y a 40 ans (deux fois 20), ça ne changeait pas la vie des autres ? C’est ça en fait, tu sais ce que tu vas leur dire, tu vas leur dire que toujours depuis cette époque, on te demande de rédiger les oraisons funèbres, et là tu t’es mis en tête de dire au revoir à l’annus horribilis. Il y a comme un pattern.


Alors tu vas leur raconter qu’il n’y a pas à se plaindre, que le Time s’est trompé. On ne peut pas dire « comme en 20 » comme on dit « comme en 14 », on n’a pas eu la guerre cette année quand même, ce n’était pas non plus la drôle de guerre. Bon, on a eu une drôle d’année quand même. Savent-ils que quand tu étais djeun déjà, il y avait les mêmes attaques ? Que déjà les sirènes hurlaient devant Tati et que tu ne pouvais plus aller à la Fnac parce qu’elle avait explosé, elle aussi ? C’était il y a presque deux fois 20 ans, en quoi cela aurait été différent du vendredi 13 novembre 2015 et différent des attaques de 2020, le vendredi 3 janvier à Villejuif, le samedi 4 avril à Romans-sur-Isère, le vendredi 25 septembre à Paris, le vendredi 16 octobre à Conflans-Sainte-Honorine ou le jeudi 29 octobre à Nice ?


Alors voilà, ce que tu vas leur proposer, c’est de continuer ou de recommencer ou de commencer à lire. Pour mettre en perspective. Pour distancier. Tu leur files tes vingt auteurs préférés pour leur petit Noël et ils te diront s’ils ont aimé. Ils sont tellement sympas tes amis inconnus.


Les 20, le cadeau


Svetlana Aleksievitch, Emmanuel Carrère, Albert Cohen, Virgine Despentes, Fiodor Dostoïevski, Marguerite Duras, Brett Easton Ellis, Annie Ernault, Julien Gracq, Michel Houellebecq, Franz Kafka, Milan Kundera, Jonathan Littell, Yukio Mishima, Marie Ndiaye, Philip Roth, Sylvain Tesson, Michel Tournier, Marguerite Yourcenar, Emile Zola…six filles et quatorze boys, hum.


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