Kampung
Kampung
Il faut à chacun son kampung
désert de retraite pour les temps
hors du monde
sous un toit qui sent soi
son enfance
les rêves du passé
où l’heure ne s'écoule pas
les années se ressemblent
immuables
sous la loi du clan
retrouvé
recréé
à l'infini
Auquel on ajoute les enfants
lorsqu'ils naissent
un à un
bourgeons de printemps
rédempteurs
bouffées d'air
piaillant puis meuglant
criant
se calmant enfin
lorsqu'ils enfantent
à leur tour
La famille sous les palmes
qui copule en cachette
quand la nuit descend
sur la forêt primaire
Trois générations qui somnolent
dans un soupir d’aisance
d'être au kampung
matrice
aimant qui attire
à l'été
le clan
Le manger
le dormir
ensemble
sur les mêmes pilotis
sous les mêmes fagots de paille
maison de cochonnet
qu’emportent les moussons
Il faut qu'à Paris aussi
on déroule les tapis
pour y laisser tranquille
la soif de trop vivre
et calmer une fois l’an
le feu du tourbillon
je vois les joint families
qui ne comprennent rien
aux brisures de nos couples
les jeux d'enfants
dans lesquels les parents
se mêlent parfois
les parties de plaisir
les plongées dans le fleuve
grossi par la pluie
bruissante
fêtée comme Allah
Janine caillera
Caille du ciel d'Afrique
ptérodactyle
agile
caille-rat
racaille
en toi
l'insulte naît d’une bourrasque
de parfum d’iode
qui se déverse sur des chants de marbre au zénith
tu ris fort de femme
aux seins
oiseau de nuit finissante
éther du soir
le doigt de l'air
effraie
les âmes des santons
parisiens
qui vaquent sans cravate
à l'été qui vient bientôt
toi dans la marche cambrée évoque
le tonneau de Diogène
qui cahote
sur nos âmes esseulées perdues
offertes privées de sort commun
toi dont la voix remplit mon corps
résonne dans les tempes
de ma pauvre folie
claironne dans les parties
de mon sexe
caillera de salon
de haine
de banlieue
locataire de
commissariats
racaille incendiaire
de pneus
poulette virile de luxe
je t'aime
pour ta moto repeinte
je t'aime
pour ta bagouze
à mon nom
de pute
je t'aime pour ton patchouli
vulgos
tu pleures et je ris de te voir
m’aimer
disquette
tu vadrouilles
parfois
d'un gonze à l’autre
d'un coup à une tire
d'une boîte à une boutique
d'une barre à un faubourg
paumée
comme moi
comme tous
gadjos de cités
pépés sur le tôt
je pleure de
toi
qui ne t'
émeus pas
mais combles encore
mon cœur
ne le sachant pas
Janine
Mum
En toi la nuit
je pensais
à toi
le jour
et rêvais de quitter
le noir
de toi
dehors aujourd'hui
je songe
à risquer
mon corps
dans un sombre
caisson
aux sons artificiels
à la goutte cristalline
réplique d’utérus
pour citadin cadre à cravate
Mum
qui m'a eu
qui m'a fait
toi qui
m'a souffert
qui m'a donné
qui t’es offerte
qui t’es perdue
de douleurs
de chien
de sang
de bœuf
pour moi
tombé sur un drap blanc
nettoyé de près pour
l'atterrissage
boule de chair
liquide fripée craquelée
Muttie
de ma vie
perdue parfois
par le cours soutenu
des petites choses de soi
revue souvent
aimée
aimée
toi
Mum
Toa
Ô l’être qui manque
dans l'avion qui bourdonne
Toi
qui respires dans tes lignes
Toa dont la connivence
née d'hier
semble acquise
pour ce parcours terrestre
où l'on ne peut pleurer
à l'infini toujours
où il faut bien rêver
de partage complet
où l'Astre nous incite
à décupler
nos érections
nos éructions
nos attouchements
nos danses de la nuit
passades du printemps
Qu’elle dure la vie
que Dieu
s'il veut bien
exister
admire ce match
contre l'ennui mortel
de se sentir partir
qu'il voie dans la chambrée
l'image de l'extase
rayonner au plafond
buter contre le lustre
de Murano
pendu
voyeur
jouisseur aussi
qu'il entende les râles
heurter le baldaquin
et frémir les draps
tâchés de l’ambre
du plaisir
de deux baleines
qui l’ont expectoré
Qu'il compatisse
et blanchisse
le noir dessein
de deux êtres qui s’aiment
de deux têtes qui se heurtent
sous les coups de boutoir
de deux sexes qui se
mêlent
et se choquent
en rythmeSaignant
Saignant
comme cœur trop longtemps
à l'étal de la vie
solitaire
désœuvré
vidé
l’œil morne
Puis
l'esprit soudain saisi
de désir de donner
un bout de corps
un lot de rire
une langue qui s'emmêle
dans un baiser solaire
une fesse qui frôle
une fesse voisine
la langue emprisonnée
la langue tournoyante
entremêlée à l'autre
qui parcourt son corps
qui lèche doucement
les parties érigées
sur un chemin salé
du haut vers le bas de
l'Autre
Cette Alter qui occupe
tout l'esprit
cette création révélée
cette fureur qui se donne aussi
dans un râle deviné
un cri réalisé
Encore
un plexus vrillé
qui se tord d’être aimé
en disant quelques mots
de la découverte
de la nouveauté retrouvée
du rêve consenti
Et le désir
qui reprend le dessus
le frottement sublime
le fluide qui s'échappe
dans un râle final
avant un grand sommeil
enlacés encore
tête contre tête
sang contre sang
dans les tempes
prélude d'une nuit
de retrouvailles
qui durera encore
le temps de réveils excités